samedi 3 septembre 2011

Plat de Résistance

 En m'arrêtant à Lyon cet été, j'ai été intrigué par des affiches vantant une exposition au Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation. D'abord méfiant, échaudé par les récentes et indigentes expos Pratt et Architecture et BD, j'ai fini par me convaincre d'y "passer faire un tour", notamment pour m'abriter de la pluie.


Résultat des courses : Traits résistants - La Résistance dans la bande dessinée de 1944 à nos jours, réalisée en collaboration avec le Musée de la Résistance de Champigny-sur-Marne est une des expos consacrée à la BD les plus réussie que j'ai jamais vue, réalisée par de vrais chercheurs, des scientifiques, des historiens, non "spécialisés en BD", mais qui ont intelligemment et modestement su s'entourer de bibliothécaires, d'archivistes et de spécialistes du neuvième art. Cette expo m'a d'autant plus passionné que je connais très mal non seulement cette période de l'Histoire mais également la bande dessinée des années 40-50.

Axée sur cinq thèmes : "l'unité dans la diversité, le maquis, la violence, l'aide aux personnes pourchassées et persécutées, la parole libre", l'exposition se propose "d'explorer la place de la Résistance dans l'imaginaire collectif" et s'en donne les moyens. Tout le musée -c'est à dire deux étages- est occupé (hum) et une demi-journée suffit à peine pour tout lire, de l'impressionnante frise historique du hall d'entrée aux innombrables autant qu'instructifs cartels, en passant évidemment par les nombreux illustrés d'époque aux titres édifiants jalonnant le parcours.
Les Cœurs Vaillants, Coq-Hardi, Vaillant, les Dédé Loupiot contre les Boches, Fifi gars du maquis, Grêlé 7-13, Mousquetaires du maquis entourent les planches originales de La Bête est morte (déjà vues à l'expo BD et judaïsme). Les travaux de Bastard, Bourlès, Gaty, Le Rallic, Marijac, Nortier, Poïvet... côtoient des récits plus contemporains signés Levallois, Gibrat, Vallée et Nury... On y suit même la réalisation "en direct" d'une BD à paraître au Lombard.




Pour rappeler la réalité, les commissaires ont su intégrer quelques objets d'époque comme ces dessins d'enfants, visionnaires, de glaçantes affiches de propagande (saviez-vous que "le juif [était] le chancre de la France" ?) ou encore ces poignantes lettres jetées des trains par les déportés, telles des bouteilles à la mer, ainsi que de nombreux document sonores et films de propagande des deux camps, Wrill écoute la BBC, réalisé an Belgique par Albert Fromenteau dans la clandestinité venant clouer le bec à Nimbus libéré.
 


Pour ceux qui ont encore faim, un catalogue contenant entre autres quelques crayonnés de Calvo et une courte histoire inédite de Crepax prolongera sans se contenter de reprendre stupidement et commercialement (cf supra) le contenu de l'exposition, justifiant pleinement son prix.


 Conclusion : 20/20. C'est certainement comme cela qu'on donnera des "lettres de noblesse" à la bande dessinée. A quand un Alfred pour la meilleure exposition ?

L'exposition Traits résistants est à voir au CHRD de Lyon jusqu'au 18 septembre 2011 (je sais : je suis très en retard, toutes mes excuses).

3 commentaires:

Li-An a dit…

Perso, j'aurai préféré une vision de la BD de l'époque dans son ensemble, collabos compris. Il me semble qu'on a dépassé le stade du la France entièrement résistante... Les gens lisaient quoi à l'époque, ça c'est intéressant. En ne montrant que le "bon" côté, on se simplifie bien la vie...

Totoche Tannenen a dit…

Il y avait non seulement des films et des affiches mais aussi quelques BD collabos. Je ne me souviens pas d'avoir aperçu Vica mais le "côté sombre" est aussi montré.
Les commissaires ne sont pas dupes et évoquent aussi l'absence de représentation de la lutte entre les Résistants eux-mêmes (du moins jusqu'à une époque récente).
Il ne faut pas oublier que tout cette "presse enfantine" était sous le contrôle de la censure, que le but premier après la guerre était que tout les Français se réconcilient.
L'expo "ironise" aussi sur ce bon côté à outrance de la Résistance comme avec cet improbable et délicieux "Tarzan contre Hitler".
Intéressante aussi l'extrême violence de certaines histoires autorisée par la censure... du moment qu'elle vise ces sales Boches !

Totoche Tannenen a dit…

(il n'y avait pas non plus l'histoire du SS qui fait caca)