mercredi 30 juin 2010

Red Hot Chili Pépère


Malgré la barrière de la langue, Jaime, jeune lecteur de Santiago, qui anime sous le pseudonyme de Galo la revue Huemulin, a vite saisi la finesse d'esprit et les goûts délicats du Plan B(d).

C'est donc grâce à lui que je découvre les galantes aventures d'un curieux petit personnage originaire du Chili : Pepe Antártico. Ce macho à gros nez obsédé par la gent féminine vit le jour en 1947 sous le crayon de Percy Eaglehurst et n'a semble-t-il jamais cessé depuis de tenter de multiplier ses conquêtes. Son comportement "limite" me fait inévitablement penser au double décomplexé de son voisin argentin, le fameux Dr Merengue.


Le chaud-bouillant Pepe fit pendant des années la joie des lecteurs du quotidien La Tercera, puis dans ceux du tabloïd populaire La Cuarta où il sévit toujours.



Pepe Antártico posséda son propre titre dont on peut voir quelques superbes couvertures sur le site de Galo. Il fut semble-t-il adapté en dessin animé, et même au théâtre !


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Merci par ailleurs à Jaime pour avoir identifié l'auteur des affiches de la loterie chilienne : il s'agissait de Luis Goyenechea Zegarra alias Lugoze, un caricaturiste renommé dans son pays, que Jaime avait interviewé à l'occasion de l'inauguration d'un mural consacré aux historietas nationales à Santiago.

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Une belle galerie rétro chez les chiliens d' Ergocomics.

samedi 26 juin 2010

Une Tigresse à Pigalle


Alors comme ça, on s'absente quelques semaines en Californie, et ces x#x*x de la Galerie 9eArt en profitent pour exposer à Paris quelques travaux (essentiellement des planches de Tigresse Blanche) de Didier Conrad... Angelin d'adoption ! J'enrage.


Puisqu'on est dans la capitale, rappelons que le toujours excellent Express BD... -Pardon : Nouvel ExpressBD™ (formule enrichie)- poste en haute déf' l'intégralité des strips de Voir Paris et mourir, le dernier épisode des nouvelles aventures d'Alix, écrites par Wilbur.

(J'ai finalement réussi à voir les originaux invendus. Ouf, ça finit bien .)

vendredi 25 juin 2010

Arizona Junior


S'il y a un endroit où je pensais pouvoir oublier la BD, c'était bien Monument Valley, en Arizona ! C'est pourtant ici, au petit musée Goulding sis dans l'ancien Trading Post, que j'allais découvrir une poignée de documents originaux de Jimmy Swinnerton (1875-1974), un des pionniers de la Bande Dessinée aux côtés des Dirks, Opper, Outcault et autres Winsor McCay.

Natif de Californie, Swinnerton se fit connaitre avec ses oursons, ses tigres et ses petits indiens (Canyon Kiddies) kawaï bien avant l'heure.
Il chopa la tuberculose à New-York en 1897 et fut exilé dans l'aride Arizona par ses toubibs qui ne lui laissaient plus que deux semaines à vivre. Il se plut tellement parmi les Hopis et les Navajos qu'il en oublia de mourir et s'y établit, y entamant une carrière de peintre paysagiste.

La Marche des Éléphants

Swinnerton finit tout de même par s'éteindre en 1974... à l'âge de 98 ans ! Une arche de Monument Valley porte actuellement son nom.

En 1940, Canyon Kiddies fut adapté en dessin animé par Chuck Jones pour le compte de Warner Bros.




Cette pourtant très belle tentative resta malheureusement sans suite. Est-ce parce que le Little Hiawatha (qu'on avait déjà vu ici) de Disney était sorti trois ans auparavant ???

jeudi 24 juin 2010

Chroniques de San Francisco

Le SFMOMA,
vu par Madonna

All Over Coffee est un comic strip poétique assez atypique, imaginé en 2003 par Paul Madonna pour le site internet MisterSF et qui depuis paraît régulièrement -désormais chaque dimanche- dans les pages du San Francisco Chronicle ainsi que sur SFGate, la version en ligne de ce quotidien. Madonna a toujours accordé une importance particulière aux échanges avec les lecteurs, lui qui pour se faire connaître glissait en douce entre les pages des journaux, chez les libraires et dans les cafés, ses premières bandes flanquées de son adresse mail. C'est d'ailleurs ainsi qu'il rencontra sa future compagne !


Après mûre réflexion, alors qu'il calait sur un projet de graphic novel, Madonna décida que son prochain projet devrait faire la part belle au dessin et que celui-ci devrait être réalisé sans crayonné, directement à l'encre. Les protagonistes ne seraient représentés qu'à travers leurs pensées et paroles (en voix-off, donc), cet artifice permettant à chaque lecteur d'imaginer, comme dans un roman, leur physionomie. Enfin, comme l'avait fait Woody Allen avec Manhattan, la véritable héroïne de l'histoire serait sa ville d'adoption, San Francisco.


Tout cela est raconté en détail dans le très beau recueil à l'italienne paru en 2007, dans lequel Madonna cite ses principales influences, qui vont des aquarelles de Ben Katchor et des dessins légendés de Raymond Pettibon aux textes d'Elvis Costello, Leonard Cohen et Bob Dylan, en passant par les strips de Tony Millionaire (Maakies) et de Garry Trudeau (Doonesbury).

Si les textes d'All over Coffee me paraissent -je l'avoue- souvent énigmatiques, je me contente souvent de rêver devant ces images en sirotant mon café refroidi, avec l'agréable sensation de continuer à flâner le nez en l'air dans les rues de Castro, Haight-Ashbury, Noe Valley ou encore Twin Peaks.

samedi 19 juin 2010

Fold-ingue



Cela fait plus de quarante ans que l'increvable Al Jaffee imagine pour le magazine Mad les Fold-In. L'originalité de ces gouaches qui ont fait sa renommée outre-Atlantique consiste dans le fait qu'une la page fois repliée en trois (c'est le contraire dans Playboy), les Fold-In dévoilent une image (et une légende) cachée.


Al Jaffee
in Mad #241, 1983

La galerie interactive que propose le site du New York Times permet de mieux comprendre le principe.

The Mad Clearance Catalogue
of unwanted articles, features,
gimmicks, and premises
par Frank Jacobs
in The Plaid Mad,
Warner books, 1985

À 89 ans, et alors que Mad ralentit la cadence en devenant trimestriel, Al Jaffee (né en 1921) est toujours actif. Le dernier sujet en date, consacré à Tiger Woods (Mad #503), laisse d'ailleurs supposer que les Fold-In sont toujours de première fraicheur.

Al Jaffee est d'ailleurs le doyen de la "bande d'idiots" du journal d'Alfred E. Neumann puisque Jack Davis (né en 1924) et Mort Drucker (né en 1929) sont tous deux à la retraite et que si Dave Berg (1920-2002) figure toujours au sommaire, c'est uniquement par le biais certains de ses cartoons qui y sont irrespectueusement (on en attend pas moins de Mad) parodiés.
Al Jaffee devance par ailleurs, et de loin, ses autres anciens confrères Paul Coker Jr. (né en 1929) et Sergio Aragonés (en 1937), ainsi que les scénaristes Duck Edwing (1939) et Dick DeBartolo (1945), frais comme des gardons.

Al Jaffee par lui-même
in Mad # 280 (version anglaise), 1985

En 1981, le dessinateur Luc Mazel reprend le principe des Fold-In le temps d'une couverture du magazine Spirou. Joli clin d'œil... Dommage que le nom de l'artiste étasunien ne soit pas mentionné.



Luc Mazel
Spirou n°2238,
Dupuis, 1981



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Quelques liens :
- Le site d'un fou de Mad, avec notamment toutes les couvertures du magazine :
http://madcoversite.com/index.html
- Deux interviews d'Al Jaffe :
http://viceland.com/int/v13n5/htdocs/al_jaffee.php?country=us
http://thedailycrosshatch.com/2009/03/03/interview-al-jaffee-pt-1-of-3/

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Mise à jour du 30 juin 2010 :


Honte à moi : Julien me rappelle que j'ai oublié de citer la formidable prouesse d'Étienne Lécroart qui, dans le mini-album Pervenche & Victor paru en 1995 dans la collection Patte de Mouche à L'Association, reprenait également le principe des Fold-In, mais cette fois-ci sur toute la durée du récit !

vendredi 18 juin 2010

J'ai déjà vu ça

Walthéry et Aragonés

Je rappelais dans le billet précédent que c'est Sergio Aragonés qui fournit à François Walthéry la documentation concernant Los Angeles pour la mise en images du diptyque d'Étienne Borgers : Instantanés pour Caltech/Les Machines Incertaines (albums 8e et 9 de la série Natacha) -les deux auteurs s'étaient rencontrés quelques années auparavant à Angoulême- et que pour le remercier, Walthéry donna à un des inspecteurs du FBI les traits du dessinateur étasunien (l'autre étant joué par Paul Deliège si je raconte pas de connerie).


Les anciens lecteurs de l'hebdo belge des années 80 se souviennent sans doute qu'à son tour, Sergio Aragonés embaucha l'hôtesse de la BARDAF, le temps d'un gag. Je n'ai pas réussi à remettre la main sur le numéro de Spirou qui y faisait allusion, mais c'est finalement en feuilletant un vieux Mad que je viens de re-découvrir ce fameux cartoon !

A Mad look at... Air Travel
Sergio Aragonés
in Mad Classic Flops
1986, E.C. Publications

Alors que j'écris ces lignes, je me dis que cette anecdote doit forcément déjà figurer dans le troisième volume des intégrales... Bof.


Les photographies sont extraites du Spirou n°2199 (1980)

samedi 5 juin 2010

Mad, Mad, Mad world

Stay Tooned n°4 - septembre 2009,
couverture : Tom Richmond,
avec -de haut en bas et de gauche à droite- :
Tom Richmond, Jack Davis, Sergio Aragonés,
Don Edwing, Scott Nickel,
John Kovaleski, Paul Coker, Ted Rall
et... Alfred E. Neuman, de dos !

Malgré la crise économique et la concurrence d'internet, et alors que l'iPad vient de débarquer, une poignée de fanzines consacrés à la bande dessinée s'obstine à paraître de par le monde.
Aux USA, j'ai ainsi récemment eu le plaisir de découvrir, à la librairie du Cartoon Art Museum de San Francisco, le fanzine Stay Tooned ! dont la quatrième livraison était entièrement consacrée à l'"usual gang of idiots", autrement dit la fine équipe de Mad, le fameux magazine satirique fondé par Harvey Kurtzman en 1952.


John Read, l'éditeur de ce fanzine, y interroge de manière classique mais efficace les vétérans représentés par Jack Davis (présent dès le premier numéro) qui annonce l'élaboration en cours d'un ouvrage consacré à l'ensemble de son œuvre, Paul Coker, ainsi que le prolifique et "marginal" Sergio Aragonés (rappelez-vous du flic moustachu dans Instantanés pour Caltech -Natacha t8-), dessinateur du génial et débilissime Groo the Wanderer. Le nom de Don "Duck" Edwing -qui complète cette brochette d'anciens- ne vous dit peut-être rien ; pourtant celui-ci signa - parfois anonymement- pendant une cinquantaine d'années d'innombrables scénarios, notamment pour Bob Clarke (reprise de Spy vs Spy, la mythique série du Cubain Antonio Prohías) et Don Martin, "Mad's maddest artist", disparu en 2000 mais tout de même présent dans ce numéro au travers d'une biographie soignée.

Sergio Aragonés vu par François Walthéry
in Instantanés pour Caltech (Natache T 8),
éditions Dupuis, 1981

Ce numéro de Stay Tooned ! , richement illustré, s'intéresse également aux jeunes "idiots" que sont John Kovaleski, Scott Nickel, (également collaborateur de Jim Davis sur Garfield), Ted Rall, cartooniste francophone particulièrement corrosif (le plus controversé des États-Unis, paraît-il, et dont trois ouvrages ont été édités dans nos contrées par La Boîte à Bulles) qui prend un malin plaisir à égratigner le système éducatif étasunien avec sa série 7 periods closer to death, pas loin de faire penser aux Simpson, ainsi que le caricaturiste Tom Richmond qui hérite de ses ainés Jack Davis, Mort Drucker et Angelo Torres la mise en images des parodies de films et séries télévisées dont Mad s'est fait une spécialité depuis des décennies.

© Ted Rall

Pour 9 $, les amateurs de comics, fans de Mad, abonnés à Scarce et autres orphelins de Comix Club, devraient donc être comblés.
Enfin... De ce côté-ci de l'Atlantique, il faudra tout de même rajouter pratiquement la même somme pour les frais de port... À moins que Mr Read ne prévoie une version en ligne ? Arf ! Arf ! Arf !

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Bonus :
- Stop the Presses : how to save the Newspapers par Ted Rall et David Essman :




- Quelques illustrations de ce coquin de Coker
- Une galerie dédiée à Jack Davis sur Flickr.