vendredi 5 décembre 2008

¡ Exijo una explicación !

condorito gag auto
Connaissez vous le personnage de Bande Dessinée le plus populaire en Amérique Latine ?
Non, il ne s'agit pas de Superman, Mickey ni de Donald... Encore moins de Tintin ou d'Astérix... Pas même Mafalda ni Mortadel et Filémon !
Non ! Cette super star, lue par des dizaines de millions de personnes, mais inconnue de ce côté-ci de l'Atlantique, n'est autre que le Chilien Condorito.

condorito coleccion 1 2007
Ce petit condor est en effet un véritable phénomène éditorial puisque ses aventures (ou plutôt ses gags, les histoires les plus longues ne dépassant pas cinq pages) sont traduites dans toute l'Amérique Latine, de la Patagonie au Mexique, en passant par le Brésil et les Caraïbes où on le retrouve en République Dominicaine et à Porto Rico, et même jusqu'aux USA où ses tribulations sont publiées dans plusieurs journaux hispanophones.
Il existe même des éditions de collection réunissant les vieilles histoires, ainsi qu'un spin-off, Coné, mettant en scène le neveu de Condorito.
De nombreux lecteurs mexicains, boliviens ou argentins par exemple, sont d'ailleurs persuadés que Condorito est un héros national !

condorito collecion 3 2008
Condorito fut créé officiellement (certains mettent en doute sa paternité) en 1949 par le dessinateur René Ríos Boettiger alias Pepo (1911-2000) pour le magazine Okay en réaction au dessin animé de Walt Disney "Saludos Amigos" (qui sera suivi deux ans plus tard par "Los Tres Caballeros").
En effet, Pepo (qui eut l'excellente idée de mettre un terme, quelques années auparavant, à ses études de médecine) n'aimant pas le personnage-type créé en 1942 par Disney pour représenter les Chiliens (un petit avion nommé Pedrito), décida d'inventer lui-même un héros auquel ses compatriotes aimeraient s'identifier.
Hésitant un moment à choisir le huemul (un petit cervidé andin en voie d'extinction), il finit par opter pour le condor, l'autre animal emblématique national.

condorito coleccion 6 2008
Pratiquement toujours vêtu d'un jean élimé et du même tee-shirt rouge, chaussé de vieilles sandales, au volant d'une guimbarde déglinguée, clope au bec, constamment fauché, peu engagé politiquement (ce qui lui permit certainement d'éviter la censure sous la dictature), éternel rêveur et gaffeur, cherchant pourtant sans cesse à se rendre utile, infatigable coureur de jupons, il n'est pas étonnant que les lecteurs furent (et soient toujours) nombreux à s'identifier au petit rapace !

condorito gag 2
Très débrouillard (comme tous les Chiliens !) Condorito, contrairement à notre Gaston Lagaffe, (son expression-type : "¡ Exijo una explicación !" pourrait se traduire par : "M'enfin !?!") cumule quant à lui emplois divers et fonctions variées.
On le retrouve donc successivement, selon les besoin de tel ou tel gag, pompier, soldat, détective, footballeur, charcutier, fermier, mendiant, écrivain, carabinier, etc, etc.
Je préfère personnellement quand il reste le Condorito tout simple, éternel amoureux de la jolie Yayita et rival de Pepe Cortisona (saco de plomo), le sosie de Burt Reynolds.

condorito yayita 1
condorito yayita 2
Certes, les gags de Condorito ne volent paradoxalement pas bien haut : ces petites historietas sans prétention ne dépassent que rarement le premier degré et s'apparentent plus aux blagues de l'Almanach Vermot ou aux gags des Pif, Pifou et autres Placid et Muzo Poche de notre enfance, Pepo usant et abusant du fameux "tombage dans les pommes" de chute.

condorito plop
J'ai néanmoins de l'admiration pour ce petit personnage au charme désuet, non seulement parce qu'il tient, sans discours politique haineux (ni potion magique), la dragée haute au "Ratón Mickey" et au "Pato Donald", mais surtout parce qu'aussi incroyable que cela puisse paraître, Condorito est, dans ces pays où "le 9e Art" est quasiment inconnu (Argentine mise à part), par sa présence dans tous les kiosques à journaux, le seul représentant (et défenseur) de la Bande Dessinée.

kiosque journaux santiago condoritoUn kiosque à journaux à Santiago.

Et ça, c'est un exploit.
Je sens que je défaille !
¡ Plop !

condorito plop !
Tout sur la création de Condorito (en espagnol (SP))
Interview de Pepo, genèse de Condorito et une histoire de 1949 (SP)
Portail de la BD chilienne (Pepo, Lukas, Alvaro Molina...) (SP)
Le site officiel de Condorito (SP et GB)
L'intégralité du premier album (1955 ?) de Condorito en PDF (SP)

13 commentaires:

Anonyme a dit…

Tiens!
Je suis espagnol, je connais bien le Mexique, et je n'ai jamais entendu parler du personnage! Ça a l'air d'une spécialité du Cono Sur...
En tout cas, ça ressemble vraiment aux BD de mon enfance, Zipi Zape, Mortadelo, Carpanza. Même réalités économiques et politiques, même type de BD?

Hobopok a dit…

S'il est traduit dans toute l'Amérique latine, ça va c'est pas trop de boulot, juste un version portugaise pour le Brésil, une version française pour la Guyane et Haïti, et hop. Parce que pour le reste, la version originale devrait faire l'affaire

Li-An a dit…

Un type qui arrête ses études de médecine pour dessiner ? Je comprends que tu défailles :-)

Anonyme a dit…

¡Hola, chico Asbel ! >
J'avais ramené mon premier Condorito du Mexique il y a quelques années, pensant qu'il s'agissait d'une création locale. Il est vrai que Condorito est surtout présent dans les kiosques à journaux chiliens (mais tous ! (bientôt des preuves ici-même !).
Je ne crois pas qu'il soit présent en Espagne (mais je peux me tromper).

Hobopok > J'ai eu l'occasion de lire du créole haïtien à Miami (il y a des annonces dans cette langue affichées dans les bus, je ne crois pas avoir vu cela à La Réunion !). C'est quand même assez éloigné du français, mais on arrive à comprendre un peu quand on le lit "à voix haute".

Li-An > J'ai l'impression qu'il y a une tripotée de dessinateurs qui ont abandonné la fac de médecine en route.

Anonyme a dit…

C'est vrai qu'il a une tête sympathique, ce Condorito. Sa petite amie me fait penser aux femmes que dessinait Bellus.

Cela parait assez naïf, mais pas plus dans le fond que Blondie ou que d'autres daily strips qui sont parus dans nos journaux pendant plusieurs décennies.

Si je vais un jour au Mexique, j'en ramènerai certainement un exemplaire (ce qui mettra bien sûr ma femme en rage) ;-)

Anonyme a dit…

C'est de la BD de studio : les dessinateurs étant plus ou moins habiles, je te conseille, pour ne pas être trop déçu, d'essayer de trouver les numéros de "collección", plus réussis graphiquement à mon goût.
Yayita est aussi mignonne mais bien plus sage que ses voisines argentines, dessinées par Divito !

Anonyme a dit…

Condorito n'existe effectivement pas en Espagne. J'en ai rammené qq uns du MExique et c'est effectivement affligeant: le "tombage dans les pommes" est systematique et permet au lecteur de comprendre qu'il y a une chute.
Je prefere de loin la famille burron, ou memin penguin.

Anonyme a dit…

Deux fois "effectivement" en deux phrase. C'est l'appauvrissement du vocabulaire :P

Hobopok a dit…

Rhââ, mais qu'est-ce qu'y me chante, lui , avec son créole ? Mais non ! Je voulais juste dire que pour être vendu au Pérou, en Equateur, en Colombie, en Argentine, en Uruguay, au Paraguay, en Bolivie, etc... y avait peut-être pas besoin de traduction. Enfin c'est ce que je me dis dans mon ignorance des finesses linguistiques latino-américaines.

Anonyme a dit…

Je suis chilien d'origine et effectivement Condorito est très très important dans la culture populaire locale. Il l'est tout autant dans le reste du continent, plusieurs latino-americains s'identifient au personnage. Les personnages qui entourent le héros sont des bonnes caricatures de habitants surtout de Santiago. Il existe aussi dans la BD quelques personnages d'une origine autre que chilienne, comme par exemple le personnage de Che Copete, le voisin argentin.
Les BD ne sont pas traduites en tant que tel mais adaptées aux expressions locales, différentes dans chaque pays.

Totoche Tannenen a dit…

J'ignorais cette subtilité au sujet de Che Copete .

Au sujet des relations entre Chiliens et Argentins, je conseille vivement aux cinéphiles le film chileno-argentino-espagnol "Mi mejor enemigo" (Mon meilleur ennemi) réalisé par Alex Bowen en 2005, qui raconte la situation ubuesque dans la quelle se retrouve deux bataillons "ennemis" perdus en Patagonie lors du conflit qui faillit opposer les deux pays en 1978 à cause de trois pauvres ilots perdus au milieu du Canal de Beagle (ça devrait aussi intéresser les passionnés de géographie, donc.)
Ça vaut selon moi ses 5 étoiles au crash-test d'Hobopok.

Anonyme a dit…

Pour quoi est-ce que vous parlez du Méxique, lorsque Condorito c'est tout chilien?

Totoche Tannenen a dit…

Si vous voulez savoir pourquoi, il suffit de lire le billet.