mercredi 5 août 2009

Les Hauts de Plage


Le 23 juillet 1981, les petits lecteurs du beau journal de Spirou (ami partout, toujours) constataient avec stupéfaction la disparition de Yann et Conrad, les sulfureux duettistes de l'animation, chargés de re-dynamiser (dynamiter ?) le magazine qui tendait à s'endormir sur ses lauriers.

Le redouté C.E.A® (Club des Ennemis de l'Animation) avait-il eu raison de ces infâmes trublions, coupables des désormais fameux Hauts de Pages d'où ils tentaient de stimuler -en les brocardant- leurs confrères ?

Que nenni. Les deux compères, qui travaillaient -afin de coller au mieux au contenu des pages sous-jacentes- en flux tendu depuis déjà plus de six mois (allant jusqu'à dormir dans les bureaux de la rédaction, mais c'est une autre histoire...), avaient tout simplement décidé de prendre une semaine de vacances bien méritée.

Pour ne pas relâcher la pression sur leurs collègues adorés, ils eurent l'excellente idée d'embaucher deux remplaçants de qualité. C'est ainsi que Tome et Janry se virent proposer ce "sale boulot".
"Nous avons accepté, à la limite pour leur rendre hommage, parce que nous savions qu'ils étaient plus menacés que nous. On a essayé de se montrer solidaires avec ces bonshommes-là, on les aimait bien." confiera plus tard Tome à Vivian Lecuivre (in Yann & Conrad-Une Monographie, éditions Mosquito, 2007).

L'exercice n'était pas sans risque : en effet, après des années de vache enragée à bouffer du Francis, du Greg ou du Dupa, à illustrer les rubriques du Fureteur et de l'excellent Jeurêka, Tome et Janry venaient tout juste -consécration suprême- d'hériter des aventures de Spirou et Fantasio, en signant dans le n°2253 un premier court récit prometteur, intitulé La Voix sans Maître.

Tout en respectant l'esprit caustique et auto-dérisoire qui rendirent mythiques les Hauts de pages, il s'agissait donc d'y aller mollo et de ménager les susceptibilités pour ne pas risquer de se faire reprendre le fabuleux joujou que Dupuis venait de leur offrir.
Au vu des images (hélas massicotées) qui suivent, je pense que l'objectif fut pleinement atteint.


Ici, je pense que Y. et C. auraient flingué Mittéï...




Là, peut-être Hislaire...




Dans cette histoire, le pauvre Dédé fut le seul à vraiment "morfler"...






Il manque Théti-Chéri et Génial Olivier, non ?...








Finalement, le plus caustique de ces HdP fut le dernier : la casse était limitée.
Tome et Janry garderont Spirou jusqu'en 1995.
Ils réaliseront quatorze albums.


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Avant de reprendre Spirou et Fantasio,
Tome et Janry signaient dans le magazine JR+PH (pour Jean-Richard Geurts et Philippe Vandevelde) une page de jeu hebdomadaire truffée de gags, intitulée Jeurêka et présentée par un pseudo-explorateur subtilement dénommé... John Perill.

5 commentaires:

Raymond a dit…

Oserai-je dire quelque chose de mal pensant ... enfin voilà ! Dans mes souvenirs, ces petits crobards insolents au dessus des planches BCBG de Roger Leloup, c'était rigolo, mais cela ressemblait tout de même à une sorte de mobbing.

THIERRY CHAVANT a dit…

A ouaiiiii !!!! nom de dzouuu !!! trop cool de relire ça, le pire c'est que je me souviens de certains gag ! a ouai, beau boulot bravo ! à tiens, faut que je mette ce blog en favoris chez moi.

Totoche Tannenen a dit…

@Raymond :

Je pense que cela mettait surtout en évidence le manque total d'humour et l'incapacité de certains auteurs à l'ego surdimensionné à se remettre en question.

Je pourrais éventuellement partager ton idée de harcèlement moral au sujet de Mittéï ou de Devos... Là oui, c'était méchant, on ne tire pas sur une ambulance...

Mais pour un dessinateur talentueux comme Leloup, ou pour DeGieter, certainement pas ! Ils avaient oublié qu'on était là pour s'amuser, que le journal était fait pour les lecteurs et pas uniquement pour eux ?
En quoi les moqueries -sommes toutes gentilles- envers Yoko Tsuno et Papyrus empêchait-elles d'apprécier ces séries ? La meilleure preuve en est qu'elles paraissent toujours...

Franquin, Degotte, Walthéry, Cauvin, ne voyaient pas de mal là-dedans. Ils se sont même payés Tillieux (avec Chaland ) !!!

Crois-moi : un bon ami se doit de te prévenir quand tu chopes la grosse tête...
Comment ne pas s'étouffer de rire quand on apprend que Mme Leloup découpait chaque semaine les Hauts de Page avant que son mari ne lise le Spirou !

Rappelle-toi cette phrase de Pierre Desproges : "On peut rire de n'importe quoi, mais pas avec n'importe qui".

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Mobbing : situation de communication non éthique caractérisée par la répétition, sur une longue durée, de la part d'une ou de plusieurs personnes, d'agissements hostiles dirigés systématiquement contre un individu qui développe, en réaction, de graves problèmes physiques ou psychologiques.
Il constitue un processus destructeur qui peut entraîner l'invalidité permanente, voire la mort de la victime. Deux conditions doivent être remplies pour que l'on puisse considérer que l'on est en présence de mobbing: la durée et la répétition.

Raymond a dit…

Je ne connaissais pas cette anecdote au sujet de Leloup :-)

Au fait, ne représente t-elle pas tout de même le signe d'un "grave problème physique ou psychologique"? ;-)

A part ça, tu as raison. Depuis un certain nombre d'albums, Leloup semble avoir un peu oublié ses lecteurs.

Totoche Tannenen a dit…

Ah oui ? Je ne savais pas.

Ma remarque ne valait que pour l'époque : j'avoue que je viens de lire seulement la semaine dernière mon premier album de Yoko Tsuno, qui trainait dans la pile "à lire" depuis des années !
Et j'avoue aussi que je me suis... régalé ! (pas fier)

Il faut dire que "Le Trio de l'étrange", premier album de la série, n'est peut-être pas représentatif, évoquant plutôt un bon vieux "Natacha"...
Ceci explique peut-être cela (Ouf, l'honneur est sauf)