samedi 25 février 2012

Plan (h)Q

 Notre envoyée spéciale au Brésil nous ayant rapporté quelques spécialités locales, voici donc, pour les lecteurs du Plan B(d), quelques "quadrinhos nationais" choisis avec goût et amour :


C'est avec Spiderman que Vitor Cafaggi découvre la bande dessinée mais ce sont Calvin, Hobbes et Bill Watterson qui lui donneront envie d'en faire. Cet auteur, originaire de Belo Horizonte se dit également influencé par Charles M. Schulz qu'il découvre sur le tard, Jeff Smith, mais également Skottie Young et Sonny Liew. Son style, tout en douceur, très cartoon et kawaï, rappelle également le fameux Herobear & the kid de Mike Kunkel. C'est donc logiquement que Duo.tone (que l'on peut commander ici) nous montre le monde avec des yeux d'enfants.


Les histoires de Gustavo Duarte ont beau être muettes (un avantage pour les non-lusophones), cela n'empêche pas d'entendre leur musique.


Taxi, au format 45 tours, nous propose une petite balade subaquatique en compagnie des sirènes et des baleines, sur fond de saxo. Et si certaines ont un éléphant dans leur douche, Gustavo Duarte, lui n'hésite pas à en mettre dans ses taxis. 


La musique de Birds serait plutôt celle des films d'Alfred Hitchcock. Les Oiseaux de Gustavo Duarte ont la mort aux trousses, même si ce huis-clos claustrophobogène m'a rappelé Shining. Humour très noir.
Profitez-en pour découvrir le blog des jumeaux Fabio Moon et Gabriel Bá, qui signent la postface de Taxi. Cela devrait vous plaire, surtout si vous êtes adeptes du travail de Cyril Pedrosa.


L'épidémie des adaptations littéraires semble avoir atteint les côtes du Brésil, le gouvernement cherchant ainsi à encourager la lecture.
Le Pauliste Guazzelli, également illustrateur, professeur d'illustration et directeur artistique sur des films d'animation (et primé au Japon !), adapte Demônios, un  conte peu connu d'Aluísio Azevedo (1857-1913), grand écrivain naturaliste brésilien qui avait semé sa zone à l'époque en osant traiter du racisme. Très belle promenade nocturne, dans les ruelles pavées de Porto Alegre (?). Atmosphère oppressante et moite. Pour les insomniaques amateurs de démons de minuit. Et de Loustal.


A escrava (l'esclave) Isaura est un roman de Bernardo Guimarães, paru en 1875 relatant la fuite à Recife de la fille d'une esclave noire et d'un homme blanc, sous le règne de l'empereur Dom Pedro II. Pour l'adapter, Guazzelli s'offre cette fois les services du scénariste carioca Ivan Jaf, ancien collaborateur de l'Argentin Solano Lopez. Le trait de Guazzelli est toujours aussi nerveux et efficace, avec des couleurs vives jetées à même le crayonné. Superbe. Les grandes propriétés n'ont rien à envier à celles de Fantômes blancs ! Un cahier pédagogique avec making-of accompagne l'album.


Certains connaissent peut-être déjà Tulio Caetano, un auteur né en 1974 à Goiânia, passé en 1998 par l'ÉSIE d'Angoulême et co-fondateur de La Maison qui pue. On a pu voir ses dessins dans Comix 2000 et sur Coconinoworld. Il retourne au Brésil en 2007 où il crée Dr. Bubbles & Tilt, le trip sous hallucinogènes devant son poste de télévision d'un généticien travaillant dans un laboratoire secret et souterrain au dessus d'une mégalopole bodybuildingué. Ouf ! Double-pages, grand-angles, couleurs psychédéliques et saturées , vues en coupe ou en plongées, angles improbables et fourmillements de détails garantissent un voyage inoubliable au-dessus de la chaotique São Paulo et ses buildings-porte-hélicoptères. Un savant mélange d'Avoine, de Quino, d'Incal , de Jodelle et de Darrow ! Planant.


Je connaissais déjà Níquel Náusea (mauvais jeu de mot - mais ce sont les meilleurs- sur Mickey Mouse) et la ménagerie débile de l'excellent Fernando Gonsales (il est né en 1961 à São Paulo et possède un diplôme de vétérinaire) pour avoir fait l'acquisition de Com mil demônios !! au Portugal il y a quelques années. Cela me donnera une excuse pour aller le changer à la librairie ! Malheureusement, ne parlant pas le portugais, de nombreux gags m'échappent. Mais rien qu'en voyant la gueule de ses animaux, on ne peut que déplorer qu'aucun éditeur francophone ne s'y soit -à ma connaissance- encore intéressé.

Boa leitura !

 "Si tu vas z'à Rioooo"


(Muito obrigado a Sra Totoche)

samedi 18 février 2012

Génération HP

 (photo Dominique Cazenave)

En parlant de plagiat, en voici un superbe que l'archiviste du Plan B(d) a retrouvé dans le fameux n°64 de Métal Hurlant, daté de juin 1981.


(Dé)Contes et légendes de l'Orléanais

  
Deadline est un des fanzines que les éditions Cambrousse, basées à Orléans et dirigées par Wuhien et Popcube, présentaient sur leur stand du festival de Saint-Denis-en-Val le week-end dernier.

 Orléans, 
la cathédrale Ste Laurence Croix

 Ce hors-série (format A5, N/B) est déjà paru en juin 2011 et a pour thème les contes. Il réunit aux côtés d'auteurs confirmés comme Stanislas Gros, régional de l'étape, et Lionel Richerand qui signe la splendide couverture, une trentaine d'auteurs plus ou moins débutants dont je reconnais n'avoir jamais entendu parler. Certains ont pourtant déjà été publiés, d'autres viennent de l'animation ou sont encore à l'école. Pratiquement tous, comme Rozenn Bothuon, François Maumont, Luché, Julienn, Vincent Nghiem..., sont visibles sur la blogosphère.

Le Plan B(d) tient à adresser une mention toute spéciale à deux sympathiques, beaux et talentueux p'tits jeunes qui n'en veulent :
- Violaine Briat dont j'ai apprécié l'univers kerasco-miyazakien, à la fois minimaliste et très fouillé (le mieux est d'aller se faire sa propre opinion sur son blogue)


- et Thomas Rouzière dont le style m'a rappelé d'agréables découvertes récemment faites du côté de chez Ankama.



Bien sûr, le gros et vieux collectionneur bourgeois, gavé aux art-books commandés sur internet, pourra regretter qu'un écrin un peu plus luxueux ne mette pas mieux en valeur les travaux de ces jeunes prodiges : il est vrai que, sans demander des agrafes plaquées-or, une couverture un peu plus épaisse et en couleur, un papier un peu plus agréable à feuilleter qui ne se corne pas au premier regard, seraient les bien venus pour continuer à préférer lire sur papier que sur écran ; un exemple peut-être à prendre sur leurs orléanais ainés Tripiers et Samovar, qu'animaient en leur temps Jérôme Bailly, Stanislas Gros et Vain, qui faisaient des merveilles avec des bouts de ficelles.
Tous les liens.
(illustration : Yohan Sacré)

Bref, qu'importe le flacon... Quand on découvre autant de pépites pour 5 euros, il serait mal venu de faire le difficile et d'hésiter à l'acheter.

mardi 14 février 2012

Épicerie fine


Déjà organisatrice des Rencontres de la BD curieuse et éditrice de Mastadar, une collection de bandes dessinées étranges et bicéphales, la bouillonnante association nantaise Vide-Cocagne, fondée par Thierry Bedouet et Fabien Grolleau, a discrètement ouvert son Alimentation générale l'été dernier.


Le lecteur gourmet trouvera dans cette revue (peut-on encore parler de fanzine à un tel niveau de perfection ?), tenue de main de maître par Terreur Graphique et dont le second numéro vient de sortir, les meilleurs produits actuellement disponibles sur le marché. La plupart, comme Borris Mirror, Max de Radiguès, Guillaume Guerse, Jules & Tom, Nicoby, Gilles Rochier... viennent du terroir mais le talentueux -et finalement pas si terrifiant- gérant n'a pas oublié les amateurs de parfums exotiques qui se régaleront au rayon "cuisine du monde" avec les excellents Box Brown et Chuck Forsman.
Bref, plus qu'une alimentation générale, c'est une véritable épicerie fine que Vide-Cocagne nous offre là.


Alors, M. Totoche, cette Alimentation générale ?

Arf !

lundi 13 février 2012

Cocorico


Alors, comme ça, d'après tous ces messieurs-dames bien pensants de l'anti-France, au bout du compte,  toutes les civilisations se vaudraient quand-même (tiens, d'ailleurs combien ça "vaut" une bonne civilisation ?) ? On voudrait nous faire croire que les tambourins des Nabikwara pourraient sérieusement rivaliser avec le Don Giovanni de Mozart ? Ah, je ris !

Mais, nom d'une pipe, bien sûr qu'elle ne se valent pas toutes, les civilisations. Il ne manquerait encore plus que ça ! Les exemples ne manquent tout de même pas dans les livres d'Histoire, dans les livres d'Art... Je ne sais pas moi, tenez par exemple, rien que pour parler du Neuvième, un simple coup d’œil au palmarès des Grand Prix du festival international de la bande dessinée d’Angoulême suffit à démontrer l'évidence : ce n'est tout de même pas un hasard si sur 45 lauréats, on retrouve 35 Français (77,78 %) pour seulement 4 Belges (8,89 %), 3 Étasuniens (6,67 %), 1 Italien, 1 Suisse et 1 Argentin qui passait par là (2.22 % chacun -voir camembert- et encore parce qu'on a été sympas). Alors ??? C'est qui les meilleurs ? Ils sont où les Nabikwara ? Ah, ils font moins les malins, les mecs ! Eh ouais, il faudrait peut-être se sortir les plumes du cul, les gars : on n'est pas dans Les Dieux sont tombés sur la tête ici, l'Alfred ne va pas vous tomber pas tout chaud dans les bras, comme un don du ciel.
Non mais qu'est ce qu'il leur faut de plus comme preuve ?
Allez j'arrête, parce que toute cette mauvaise foi, moi ça m'énerve.

dimanche 12 février 2012

Toutes les larmes de l'enfer

 XIII T 3
Vance/Van Hamme
1986, Dargaud

Comme disait l'autre : "[...] sur la Terre et dans les cieux / tes anges n'aiment pas devenir vieux".

mardi 7 février 2012

La petite fille qui murmurait à l'oreille des renardeaux

Attention, ce billet dévoile en partie l'histoire de Pistouvi / Le Pays des grands oiseaux. Mieux vaut ne pas lire ce qui suit avant d'avoir découvert ce livre exceptionnel à plus d'un titre.

Merwan / Bertrand Gatignol 
Dargaud, 2011

Dans un monde étrange, féérique, aux proportions démesurées quoique parfois oppressant et où se mélangent rêve et réalité vivent Jeanne, une fillette, et son compagnon, Pistouvi, un renardeau qui partage sa couche, mais aussi ses joies et ses peines. Les seules créatures que l'on croise dans ce Désert-B sont une déesse protectrice, douce comme le zéphyr et un impressionnant géant finalement pas si méchant, dont les pouvoirs et la force semblent infinis et qu'il vaut mieux ne pas fâcher...
On aperçoit parfois aussi au loin quelques piafs. Il semble bien qu'ils essaient parfois de communiquer mais leurs gazouillis restent incompréhensibles et il vaut mieux les éviter, d'autant qu'ils font un peu peur à Pistouvi. On a pourtant l'impression que ces intrigants volatiles se rapprochent un peu plus chaque jour...


Rappelez-vous.
Cet univers fantastique où tout semblait possible, on l'on a (à priori) tous connu et il n'est pas si loin : il s'agit bien entendu du monde merveilleux de l'enfance où Jeanne jouerait le rôle de Calvin et Pistouvi celui de Hobbes.
Originaires des Gobelins où ils se sont rencontrés, Merwan Chabane (Le bel âge, Pour l'Empire...) et Bertrand Gatignol (apparemment une pointure dans le monde de l'animation, également aperçu sur Carmen et Travis) signent ici un "thriller psychanalyique" (osons) prenant et émouvant, d'une rare intelligence et d'une encore plus rare sensibilité (j'en frissonne encore) sur les dernières années de cette enfance et la perte de l'innocence, sur le délicat passage vers l'adolescence au moment où les premières bouffées hormonales vont transformer à jamais notre vision du monde, des autres et de nous-mêmes.
Tout le monde n'en sortira pas indemne : "Il est révolu le temps des rires et des chants / Dans l'île aux enfants, il est bientôt fini, le printemps".


Ce Pistouvi étonne aussi bien par son contenu que par sa forme, hybride tant par le format (21x15 cm) et la pagination (191 p.) que par la narration entre manga, "style Gobelins/palette" et BD franco-belge. Le dessin raffiné et délicat de Bertrand Gatignol illustre à merveille les idées de Merwan en alliant réalisme et cartoon, évoquant à la fois Kon, Miyazaki (pour les bestioles) et Tezuka (scène finale) avec un je-ne-sais-quoi de Vivès (dont il partage d'ailleurs l'atelier).


Si avec tout ça vous n'êtes pas encore étonnés, Pistouvi parait simultanément en deux versions :
- la nostalgique, celle du manga en noir et blanc tramé, correspondant plutôt à la vision de Pistouvi,
- et la version cartonnée-couleurs bonbons/Barbie/shojo-en deux tomes (dont les pages de garde en bleu/blanc arracheront certainement une larme aux nostalgiques des bons vieux albums Dupuis) reflétant la vision de Jeanne !


Enfin, l'absence du nom des auteurs et de l'éditeur sur la jaquette déstabilisera certainement le collectionneur belge mais s'avère finalement logique : quel enfant s'arrête sur ce genre de détails ?

 Ceci n'est pas une dédicace de Richard Scarry

dimanche 5 février 2012

Grosse pouffe

C'est décidé : en 2012, je me mets sérieusement à l'italien à l'aide des fumetti (un bon alibi pour dépasser mon budget-BD). Aujourd'hui : les faux-amis.


E 'deciso: nel 2012, comincio a studiare l'italiano con i fumetti (una buona scusa per superare il mio budget-BD). Oggi: i falsi amici.

Melone amaro


Une petite pub trouvée sur la toile pour Les Melons de la colère, le -déjà-avant-dernier livre de Bastien Vivès, édité dans la collection "Cul-pour-de-rire" des Requins-Marteaux. Je ne sais pas vous, mais moi je la trouve bel et bien faite.


 Le titre évoque évidemment Les Raisins de la colère mais quand on connait l’intérêt de notre jeune prodige national (arf) pour les classiques du cinéma italien, on peut se demander si cette histoire ne lui aurait pas été plutôt vaguement inspirée par un sketch de Ces messieurs dames (Signore e signori), un film de de Pietro Germi, palmedorisé et sifflé à Cannes en 1966, où les notables du village se voient "menacés de prison par un paysan qui les accuse de s'être partagés sa fille mineure" (cf Télérama n°3236).

 

Alors... Qu'en pense Bastien ?


"L'iPad, il ne passera pas par moi"

C'est un peu ce que répond un Franky Felder Balloney, visiblement à cran, dans cette improbable interrogatoire centré sur la BD-numérique et mené par Raphaël Mezrahi, habilement déguisé en journaleux de France 3 Poitou-Charentes. C'est tellement bien fait qu'on jurerait non seulement que le type n'a jamais ouvert un bouquin de sa vie, mais en plus qu'il va s'en prendre une avant la fin.

samedi 4 février 2012

Revoilà Clichy


Formé aux Gobelins, Louis Clichy travaille pour la réclame et le cinéma. On a pu apercevoir son nom au générique de Là-haut (Up) et de Wall-E et il planche actuellement sur une adaptation en 3D du Domaine des dieux prévue pour 2014. Je craque néanmoins pour ses croquis au stylo à l'ancienne qu'il montre trop rarement sur son blogue.

Après avoir superbement adapté en 2003 le tube d’Édith Piaf et Michel Emer A quoi ça sert l'amour, il réalise en 2011 un nouveau clip (avec un clin d’œil à The Wall ?) pour un titre de Louise attaque : Du monde tout autour.
C'est quand qu'il fait de la bédé ?
 

vendredi 3 février 2012

Un beau générique...



... par le gentil Tito Topin, auteur des décors de Comic strip et dessinateur, dans la même veine "pop", de deux albums des Dossiers du B.I.D.E.  écrits par Jean Yanne en 1969, que Casterman sort de l'oubli ces jours-ci.




mercredi 1 février 2012

Yann et les héritiers


Bon. Ne lisant plus Spirou et toujours pas L'immanquable, me voilà comme un flan à attendre que l'affaire Gringos locos (aperçu par bribes dans Casemate n°44) se débloque afin de pouvoir découvrir la vision par Olivier Schwartz et Yann du périple effectué dans les années 40 par Jijé, Franquin et Morris aux États-Unis et au Mexique (espérons tout de même que ça ne dure pas aussi longtemps que l'affaire Florence Cassez).


Un gag (et une promotion), visiblement dus à la grosse tête de certains héritiers, que même le provoquant scénariste des Innommables et de Nicotine Goudron n'aurait sans doute pas osé tenter !


 Pour passer le temps (et avant que la loi nous oblige peut-être un jour à le brûler), on se replongera avec délectation dans le n°64 de Métal hurlant où en 1981, Yves Chaland, assisté de Serge Clerc et Denis Sire, imaginait déjà sous la forme d'une parodie des hagiographies à la Don Bosco ou Emmanuel, une admirable et édifiante Vie exemplaire de Jijé.

Dans ces images, notre dessinateur s'est amusé 
à glisser quelques clins d’œil iconoclastes. Sauras-tu les découvrir ?

Quand je pense qu'on nous répète que c'était pas mieux avant...  Consternant.


(vignettes extraites de La Vie exemplaire de Jijé par Chaland, Clerc et Sire, in Métal Hurlant n°64, 1981, Humanoïdes associés. Merci à Alan, Jean-Mi, Jicé, Laura, Vivian et Lebrunf9)

Où ai-je mis le numéro de téléphone de mon avocat ?